De quelle province es-tu ?

Article : De quelle province es-tu ?
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9 mars 2013

De quelle province es-tu ?

L’Afrique incarne des valeurs datant de plusieurs siècles et qui ont été le socle de la stabilité des sociétés précoloniales. Ces valeurs et ces principes régulaient le mode de vie, l’éducation, l’organisation économique, religieuse, politique et judiciaire.

L’arrivée de la colonisation a contribué dans certains cas à, transformer les structures traditionnelles autarciques en des entités modernes, grâce à une approche dualiste, tandis que dans d’autres sociétés, le choc des civilisations a détruit le tissu traditionnel ; le transformant en une entité hybride où coexistent le statuquo des traditions et les effets déviants du monde moderne.

Le communautarisme, caractéristique d’un modèle économique dépourvu de toute visée mercantile, faisant des biens issus de la productions des instruments de prestige sociaux, facteurs d’autorité, de considération ou instruments d’alliance, a laissé le champ au modèle de sociétés dominées par des préoccupations matérielles dans lesquelles règnent des valeurs tout à fait nouvelles pour l’homme rural africain ; l’individualisme, le désir de liberté, l’esprit d’initiative ; de nouveaux idéaux qui ont entrainé un déséquilibre socioculturelle et économique perceptible jusqu’à nos jours.

En République Démocratique du Congo, c’est dans l’institution du mariage que les effets de ce déséquilibre, fruit de l’aliénation des sociétés traditionnelles aux courants capitalistes, sont les plus palpables. La dot, entendue comme la contrepartie financière et/ou matérielle exigée à tout prétendant, a pris au Congo, une forme inquiétante.

La monétisation de la dot, pratique plus commune aux ressortissants de la province du Bas-Congo, est devenue, au-delà de son caractère purement symbolique, un fond de commerce et une opportunité d’enrichissement éhontée, opérée sur le dos de la belle-famille. Il n’est pas rare en effet, d’entendre des familles se plaindre du coût élevé de la dot pour les filles à marier, originaires de cette contrée, dont le montant varie de 700 à 1200 euros en moyenne.

Au-delà de quelques cas isolés, cette pratique n’est que la résultante de la mutation des sociétés traditionnelles communautaristes et gérontocratiques, à celles plus individualistes et matérialistes. La crise financière et les bouleversements induits par le monde moderne, ont institué de fait ; de nouvelles règles et attitudes qui sont devenus « coutumières ».kinshasa

Le gouvernement censé être à l’avant-garde de la préservation de l’équilibre social, semble entériner silencieusement cette mutation culturelle dont l’exemple des ressortissants du Bas-Congo, qui tend à s’exporter vers d’autres tribus congolaises.

Dans un contexte socio-économique précaire, où la spiritualité ambiante assimile le célibat prolongé à un état d’asservissement spirituel dont l’origine serait des démons ou des esprits malveillants du cercle familial, il est étonnant que les défenseurs de ces théories ne trouvent aucun inconvénient à ce qu’une dot, dans un pays où le salaire minimum est de 55 euros, atteigne des proportions élevés : entre 1500 et 2000 euros dans le pire des cas.

Nouvelles technologies oblige, les smartphones et les ordinateurs portables ont fait leur apparition à côté des usuels souliers, machettes, vins de palmes, bières, vélos ou ustensiles de cuisines ; généralement exigés dans les factures énumérant les éléments constitutifs de la dot. Ces pratiques courantes actuellement en RDC, s’élèvent chaque jour qui passe en principe coutumier, tendant dangereusement à se généraliser à toutes les tribus congolaises, qui devant le mimétisme des autorités compétentes devant ces déviances, sont tentées à faire de même. Comme quoi, avant de se marier au Congo, les prétendants en arrivent très souvent à poser la très gênante question à leurs dulcinées : De quelle province es-tu ?

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